La torpeur tue
Dans ces rues devenues
Inégales
Soumises
Aux flots hiératiques
Perçus comme
Un trop long sommeil
Qui finit par blesser
Ce n’est qu’une
Ombre illégitime
Le fantôme de trop
Impossible à supporter
On n’épouse pas
La cendre
Ni le désastre
Comme seule
Parole
La pente naturelle
C’est vivre longtemps
Se laisser glisser
Comme on éprouve
Ce qui n’est plus nécessaire
Seulement vital
Et que l’on a plus
D’abord on s’insurge
On vole à ce néant
Que l’on a pu
Qualifier de beau
Ce que l’on peut
C’est-à-dire pas grand-chose
On déclare accepter
Son principe
Mais c’est faux
Peut-être
Faut-il
Accepter
De vivre avec
Je veux dire
Avec la fin
Celle qui s’immisce
Entre les lignes
Courant les rues
Libre infiniment
Ton seul frisson
Depuis des mois
Sa miséricorde
Comme un lent
Suicide collectif
Alors qu’il faudrait
Foncer droit devant
Presque à tombeau
Ouvert
Je me souviens
Du mot fatal
De cet alignement
Comme l’accoutumance
Je m’en souviens
Presque mot à mot
De son défilement
Et de « surprendre »
Comme l’ultime
Étape
Avant quoi ?
Ce temps
Que l’on vit
Qui dénude
Dans le froid
S’étire
Jusqu’aux
Douleurs
Et s’étiole
En soi
Il y a bien
Ces Dieux
Nouveaux
Les deux pieds
Dans la terreur
Et l’esprit
Dans l’erreur
Leurs promesses
D’irréel dans
La pénombre
Loin d’un monde
Revenu des morts
De ces mots
Qui mentent
A qui l’on
Ne refuse rien
Ni les souffrances
Ni les pensées détournées
Loin des splendides
Raisons de vivre
Dans l’air presque
Chaud d’une saison
Le temps de l’isolement
Des faubourgs trop
Lointains devenus
Des banlieues
Où l’on marche
Pour voir ce qui sera
Comme on roule
Dans l’obscurité
Avant le jour
Là on distille
La mort après d’autres
Pour s’habituer
Sans y arriver vraiment
Et se perdre
Dans la géométrie
Des villes
Que pouvait-on ?
Auprès d’un siècle
De nos proches menacés
Que pouvons-nous
Encore assouvir ?
Auprès de la mort
Délibérée
De ces jetées
Dans la mer
Qui ne parviennent
Plus à nous sauver
Putain d’adieu
D’enlacement suspendu
De silence et de marbre
Que peut-on
Encore imaginer ?
À part des vies
Tout juste parallèles
Séparées par
Des analyses
Pour annoncer
Le versant
D’un futur
À ce mot
De passe
Oublié
Emporté
Par la révolte
Intérieure
Tu as tout
Oublié de toutes
Les façons possibles
Et imaginables
Toutes les adresses
Et les raccourcis
Tous ces matins
Naissants et leur
Ciel d’huile
Tu as tout laissé
Plusieurs fois
Ce trop plein
De désastres
Tu as tout
Oublié sauf
Cette part
D’écroulement
La trace en toi
De l’humanité
Il y a ce
Point final
Un regard adossé
À l’ombre
Comme un soldat
Au repos
Aux sources
De la nuit
Ne rêvant
Que d’éveiller
La ville morte
À l’avant du vide
Et d’y voir
Un vaisseau
S’abreuvant
À ces mille
Visages retrouvés
Avec la nuit
Tu rêves
À ce partage
Cet horizon
Libéré de son
Bagne
Toute la nuit
Tu salues du
Regard
Cet instant
De grâce
À grands cris
Étouffés
Par le bruit
Ce chaos
Qui vient
De naître
L’attente après
Le charnier
Sur lequel
Nous marcherons
Tous
Tu peux tenir
Dans ta main
Une sorte
De détresse
Contempler
À longueur
De temps
La perte
D’un éclat
Et la peur
Qui va avec
Sa place
Immuable
À l’ombre
D’un corps
Et lire ces mots :
« C’est tout ce
Qu’il reste de la
Clarté du monde »
Et s’en trouver
Mieux
Cette figure
Prenant tout l’espace
Comme une nuit
Qui tomberait
Trop vite
Que l’on accueille
Dans la crainte
Mais silencieusement
Le corps et son ombre
Menacés
Rien qui ne vaille
D’arrêter
Cela faisait le monde
Que l’on touchait
D’une main
Son enfer
Et sa beauté
Limpide
Que l’on regarde
Maintenant
Comme une
Lueur absente
Un ciel mêlé
D’oiseaux
Que l’on observe
Comme un
Nuage fou
Cela fait le monde
Que l’on devine
Derrière ces cris
Sa lumière retrouvée
Qui se répand en soi
Au bord de l’arrachement
De l’interligne si fin
Et pourtant rien ne change
Et ne changera jamais
Comme une place inchangée
Que l’on traverse depuis
Des siècles et des siècles
Et qui s’est endormie
Au milieu du mouvement
D’une ville morte
Toujours ressuscitée
Et qui s’étend encore
Et toujours
Alors qu’aux portes
De la rupture intérieure
Une armée se lève
Et toute la solitude
S’éveille au combat
Ça ressemble
À la fin de l’hiver
À son bruit
D’arbre noir
Traversé
Par le vent
Alors que l’on
Donnerait tout
Pour cet instant
À cœur perdu
Dans l’impensé
Les jours qui
Nous portent
Sans danger
À toute chose
On se croit
Attaché
Ce qui suit
Ressemble
À ce que l’on
Laisse venir
Sans blessure
Ce que l’ombre
Peut fuir jusqu’à
La fin du jour
Comme des pas
Qui s’élancent
Dans le vide
Ne peut
S’écrire
Autrement
Qu’avec
Des silences
Le souffle
Court d’une
Marche achevée
Ce qu’il y a
De plus vieux
En soi
Ce qu’il y a
De plus précieux
Comme le rempart
De nos craintes
Les plus enfouies
Tristesse
Qui te suit
Partout
Se posant
Sur ton visage
Comme une ombre
Que tu chasses
D’une main
Caressante
Et tout le jour
C’est ainsi
Comme un spectacle
Jamais vraiment remis
De sa chute
Un cœur qui se
Remplit d’eau
Happé par ces
Grandes voies
Qui font le désir
De la ville
Ou le trou
D’un tombeau
Que l'on éloigne
On se dit
La proie
Du temps
Cet engrais
Comme aurait
Dit Glissant
Un geste
Que l’on tente
Aurait-il
Dit aussi
Après ce
Qu’il en reste
Regarde le sol
Ou le ciel
Autre chose
Que la chair
Et défile
Comme un
Souvenir vague
Dans le fracas
Du vivant
C’est un peu savoir
Où l’on va
Et ne rien en faire
De plus qu’un
Simple possible
Une simple
Cassure
Le genre
De rupture
Qui signe
Sur la chair
Le passage
Du sang frais
Au lointain
Sans l’apparence
Des blessures
De tous ces murs
Enfonçant l’horizon
Tu ouvres
Une voie à
Cet emplacement
Intérieur
Surtout éviter
Ce visage harassé
Comme écrasé
Par un poids
Qui n’est pas
Le sien
Tu t’engouffres
Dans cette rue
Qui ressemble
Aux miettes d’un passé
Qui disparaît
Comme ça
En cendres grises
Par correction
La noirceur est évitée
Elle reste comme
En suspens
La mémoire noire
Qu’il faut bien
Vêtir le mieux
Possible
Les armes trop tôt
Rangées contre
Cette parole
Crépusculaire
Venant heurter
Les rives du passé
Ce n’est qu’une
Parole défaite
La déchirure visible
De l’espace échoué
Ce qui sépare
Les visages
Devenant l’oraison
Et d’autres signes encore
Le retour de ces nuits
Et le jour informe
À peine si le front
S’embrase comme
La guerre éternelle
Que l’on peut suivre
À travers ces bruits
